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Sécurisation de la foire hebdomadaire de Ménaka : stimuler la relance économique et garantir la sécurité des habitants

Le marché de Ménaka, au nord de la ville, est en pleine effervescence en cet après-midi caniculaire de juin. Entre les épices au parfum piquant qui se mêlent à la poussière soulevée par la marche incessante de centaines de forains, les bêlements de moutons provenant d'enclos de fortune, les klaxons retentissants des tricycles, des camions de transport de marchandises et de passagers, on distingue clairement les joyeux cris d'enfants qui s’élèvent alors qu'ils courent entre les allées ou sur la grande voie qui sépare le marché des habitations. C’est la tradition du jeudi, cette animation hebdomadaire soustrait les riverains du silence et à la monotonie habituels.

« Sécuriser, être visible et mettre en confiance »

Mais la foire n’attire pas que des marchands affairés et des mères de familles venues faire des achats. Des individus aux intentions inavouées peuvent aussi s’y inviter. Du simple larcin à la violence armée, des incidents sécuritaires peuvent surgir à tout instant et, la joyeuse foire vite tourner au drame. Des épisodes de violence récents hantent encore les mémoires et les désastres qu’ils ont occasionnés marquent encore profondément la population locale.

Pour le Chef d'Escadron Léandre N’TSOUGAN de la police des Nations unies (UNPOL) basé à Ménaka, le mot d’ordre reste le même : sécuriser, être visible et mettre en confiance. Comme tous les jeudis. Les équipes se relaient, mais la détermination reste la même. Ce jeudi, c’est le Sous-lieutenant Raoul Koffi GBADJIDJO qui dirige l’opération. Cet officier de la police nationale togolaise connait la ville et ses habitants. Il est au fait du périmètre à sécuriser et de la complexité des lieux. Depuis septembre 2022, il patrouille tous les jours dans la ville et ses environs, noue des contacts auprès des Ménakois et recueille des renseignements pour mieux mener ses interventions. Il est prêt pour la foire. Ses éléments aussi.

Les Casques bleus en première ligne : Dissuasion des groupes armés et collecte de renseignements

« Dès l’entrée du marché, nous engageons une patrouille pédestre qui nous permet d’aller de commerce en commerce pour discuter avec les gens. Pour être sûrs de faire le tour de la foire, nous faisons des kilomètres à pied », explique le Chef d’équipe des policiers chargés de discuter avec les usagers de la foire, le commissaire de police Abdoulaye Senoussi HAGGAR. Mais avant, Il faut tout de suite établir un périmètre de sécurité autour du marché. Uniformes de la police togolaise, fusils d’assaut fermement plaqués contre la poitrine et casques bleus frappés des initiales « UN » sur la tête, les distinguent de la marée de forains. Les deux officiers de police de la MINUSMA, quant à eux, peuvent visiter les échoppes et les ateliers pour engager la conversation avec les commerçants et leurs clients. 

« Beaucoup ressentent le besoin de nous approcher, de raconter des situations qu’ils ont vécues ou dont ils ont entendu parler mais n’osent pas. La plupart craint des représailles. Nous les comprenons. Nous leur laissons un numéro de téléphone où ils peuvent nous appeler et nous parler loin de tout regard », explique le Sous-lieutenant Raoul. Les plus bavards cependant, n’hésitent pas à exprimer leur joie de voir des hommes en uniforme sillonner les allées du marché, mieux, s’intéresser à eux et leurs préoccupations.

Un rendez-vous hebdomadaire crucial pour la région

Devant l’étal de légumes d’Agaïcha TOURÉ, unpetit groupe de forains s’est amassé, négociant frénétiquement les prix en se bousculant pour s’arracher les tomates les plus fraiches, les poivrons les moins flétris, et d’autres fruits et légumes provenant principalement de terroirs voisins et de l’étranger. Avant la fin de la foire, Agaïcha aura écoulé toute sa marchandise, comme chaque semaine, souvent à perte car ne disposant pas de moyens pour conserver ses produits frais. Pour cette mère de six enfants, la sécurité représente le plus grand fonds de commerce. « Si aujourd’hui je peux librement aller chercher mes légumes et revenir les vendre ici au marché, c’est parce que je sais que les hommes en tenue sont là pour assurer ma sécurité. Sans la sécurité, je ne prendrais pas le risque de venir m’asseoir ici pour vendre quoi que ce soit car ma vie même serait en danger », explique-t-elle à ses interlocuteurs de l’UNPOL. 

Un large sourire et de chaudes poignées de mains accueillent les policiers sous le hangar d’Aziz MAÏGA. Ce trentenaire de Ménaka est l’aîné d’une fratrie de douze enfants. Du temps où son père tenait le commerce familial de caprins, les affaires fleurissaient. Cependant, l’insécurité qui règne dans la région ces dernières années a porté un coup dur à son commerce. Pour Aziz, les charges familiales ont considérablement augmenté, les ressources et revenus se sont amenuisés et l’impact de la paupérisation se fait de plus en plus sentir dans la famille. Comme bien d’autres jeunes de sa localité, Aziz pense à l’exil. Mais pour aller où et surtout, avec quels moyens ? Son espoir réside dans ces foires hebdomadaires, qui à défaut de lui fournir les gains escomptés, lui permettent de subvenir aux besoins de la famille. La continuité de ces foires dépend étroitement de la présence de forces de sécurité maliennes et de la MINUSMA sur le site. « Nous serions même contents si on pouvait construire un poste de police au sein du marché pour eux », conclut Aziz.

La patrouille du jeudi : Un engagement fort envers la population

La relance économique dans la région de Ménaka dépend en premier lieu de la sécurisation des échanges commerciaux. Les déplacements et les sites où ils s’opèrent sont hautement vulnérables aux attaques des groupes armés. La présence des Casques bleus dissuade les tentatives d’incursion. Elle apporte quiétude et sécurité aux forains tandis que de leurs interactions avec la population, les Casques bleus tirent de précieux renseignements qui leur permettent d’améliorer leurs interventions. Pour le Sous-Lieutenant Raoul Koffi GBADJIDJO et ses éléments, la patrouille du jeudi représente plus qu’une tâche de routine. C’est l’exécution permanente d’un serment, la matérialisation d’une solidarité envers la population qu’ils servent.