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Nord-Kivu : la MONUSCO évacue 150 personnes du territoire de Rutshuru

Entre le 28 octobre et le 5 novembre 2022, la MONUSCO a évacué par hélicoptère 150 personnes de sa base de Kiwanja vers Goma. / Photos MONUSCO

Depuis la prise du contrôle samedi 29 octobre 2022 par les rebelles du M23 des villes de Kiwanja et Rutshuru-centre, situées sur la route nationale 2 menant vers Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, à une quarantaine de kilomètres, l’incertitude et la méfiance règnent dans ce vaste territoire. 

Dans les faits, ce sont les sept groupements de la chefferie de Bwisha qui sont passés sous le contrôle des rebelles du M23. Le Mwami de Bwisha fait partie de ceux qui ont été les premiers bénéficiaires de cette évacuation de la Monusco. Cette autorité coutumière note avec amertume que « toute la chefferie de Bwisha est occupée aujourd’hui, à savoir les sept groupements : Rugari, Kisigari, Bweza, Jomba, Bukoma, Binza en partie et Busanza en partie aussi, donc toute l’entité en général. Le chef-lieu lui-même est occupé et si le chef-lieu est occupé donc toute la chefferie est tombée ». 

De nombreuses personnes, notamment des membres de la société civile, du gouvernement provincial, des médias, des défenseurs des droits humains, pour ne citer que celles-là, ont reçu diverses menaces de la part des rebelles du M23 et ont demandé l’aide de la MONUSCO afin d’être mises en sécurité après être parvenues à rejoindre, avec plus ou moins de difficultés, la base de la mission onusienne à Kiwanja (territoire de Rutshuru).

Ainsi du 28 octobre au 5 novembre 2022, la MONUSCO a évacué par hélicoptère un total de 150 personnes (64 civils, 83 militaires et trois policiers) de sa base de Kiwanja vers Goma en plusieurs rotations aériennes.

Jean de Dieu Byamungu, directeur de la radio communautaire (RACOM) « La voix de Mikeno », fait aussi partie intégrante de ceux qui ont bénéficié de cette aide précieuse. Il avait vécu auparavant les moments pénibles de la prise de Bunagana. Sa radio « La voix de Mikeno » a été pillée par le M23 à Bunagana le 14 juin dernier.

Son deuxième exil s’est poursuivi mardi 25 octobre : « Avec les deux techniciens de la radio, nous avons marché 34 km durant près de sept heures en pleine nuit. Notre but était d’atteindre la base de la Force de la MONUSCO à Kiwanja afin d’y être en sécurité car nous étions menacés », raconte-t-il visiblement soulagé. « A ce moment-là, nous ne savions pas que, quelques jours plus tard, nous serions évacués vers Goma. Nous remercions la MONUSCO pour cela. Cependant, nous avons dû laisser nos familles derrière nous », ajoute-t-il avec un pincement au cœur. Tous trois ont été évacués lundi 31 octobre par la MONUSCO en compagnie de neuf autres journalistes venus de Rutshuru-centre, Kiwanja et Rubara.

Pour sa part, Darlène Rushago de la radio Mudiho FM dit avoir été « tracée » par le M23 depuis la prise de Bunagana en juin 2022. « Depuis la prise de Bunagana, c’était en juin (2022), j’ai commencé à recevoir des menaces, par sms et appels. Et quand ils sont entrés dans le territoire de Rutshuru, c’était samedi (29 octobre). A 13h30 minutes, ils sont arrivés à la maison (…). Voilà, c’est comme ça que je me suis rendue à la Monusco à Kiwanja. Jusqu’à ce qu’on vienne d’arriver (à Goma), on était quand même bien encadré ».

De son côté, Vianney Watsongo, journaliste à la radio RTDH, dit avoir voulu quitter Kiwanja « par mesure de protection ». « Nous, nous sommes là pour appuyer aussi les actions du gouvernement. Ce que nous diffusons, ça ne peut pas plaire aux rebelles. C’est pourquoi on s’est caché à la Monusco. Nous étions gardés là-bas, c’était sous l’appel de JED (Journalistes en danger) et de l’UNPC (Union de la presse congolaise). Et c’est la Monusco qui nous a gardés pendant tous ces jours, jusqu’à notre arrivée ici (Goma) ».

En effet, sur les cinq radios installées à Rutshuru-centre, une seule est restée en ondes, à savoir la radio communautaire « Horizon » dont le directeur, Patrick Kiroha, indique qu’il ne fait que « jouer de la musique et relayer les journaux d’information de Radio Okapi, de Top Congo et de RFI ». A six kilomètres de là, dans la cité voisine de Kiwanja, sur les six radios existantes, quatre fonctionnent encore sans pour autant produire de journaux. 

"Vers 5 heures du matin le 29 octobre, on a entendu des détonations. Nous avons fui dans la panique", raconte une déplacée qui dit avoir parcouru plusieurs kilomètres à pied avec ses enfants pour trouver un abri.