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En visite à Beni, Jean-Pierre Lacroix salue les efforts de la MONUSCO dans la prévention de l'exploitation et des abus sexuels

En visite à Beni, Jean-Pierre Lacroix salue les efforts de la MONUSCO dans la prévention de l'exploitation et des abus sexuels. Photo MONUSCO/Jean-Tobie Okala

Le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, Jean-Pierre Lacroix, en mission en République démocratique du Congo depuis le 1er février dernier, vient de conclure une visite de 24 heures à Beni, dans la province du Nord-Kivu.

Parade militaire à l'arrivée du Secrétaire général adjoint de l'ONU, Jean-Pierre Lacroix, à Beni, dans le Nord-Kivu, vendredi 2 février 2024. Photo MONUSCO/Jean-Tobie Okala

Il était accompagné d’une délégation importante comprenant notamment la Secrétaire générale adjointe chargée du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité, Catherine Pollard, le Secrétaire général adjoint Christian Saunders, Coordonnateur spécial chargé d’améliorer les moyens d’action de l’ONU face à l’exploitation et aux abus sexuels, de Bintou Keita, Cheffe de la MONUSCO ainsi que le commandant intérimaire de la Force de la Monusco, le général Diouf Khar.

Si le désengagement de la MONUSCO de la province du Sud-Kivu demeure l’objectif principal de cette visite, à Beni, la délégation est principalement venue pour évaluer l’efficacité et les résultats des mesures mises en place par la MONUSCO pour faire face au phénomène d’exploitations et d’abus sexuels (EAS) commis par les agents des Nations Unies, qu’ils soient locaux ou expatriés.

Aussitôt arrivés à Beni le vendredi 2 février, peu avant 14 heures, heure de l’Est de la RDC, Jean-Pierre Lacroix et sa suite ont reçu une présentation de la situation sécuritaire générale dans la région.

Ensuite, la délégation a échangé avec des membres des réseaux communautaires de signalement de plaintes (CBCN). Les discussions ont porté sur l’amélioration de la réponse des Nations Unies aux abus et exploitations sexuels commis par le personnel (civil, policier et militaire) de l’ONU dans la région.

Par exploitation et abus sexuels (EAS), on entend le « le fait d’abuser ou de tenter d’abuser d’un état de vulnérabilité, d’un rapport de force ou d’une relation de confiance inégale en vue d’obtenir des faveurs sexuelles. Cela peut inclure, mais n’est pas limitée à l’offre d’argent ou d’autres avantages sociaux, économiques ou politiques ». La prostitution est également comprise dans cette définition.

Pour simplifier, l’exploitation et les abus sexuels incluent par exemple :

L’échange de rapports sexuels contre un emploi L’échange de rapports sexuels contre de la nourriture Avoir des rapports sexuels avec des mineur.e.s ou des personnes vulnérables (réfugiés, déplacés…) ou des personnes prostituées.

La MONUSCO en première ligne dans la lutte contre l’EAS

« C’est une problématique qui nous préoccupe au plus haut point, parce que les abus sexuels, c’est le fait d’une toute petite minorité d’éléments, qui en agissant de cette manière, porte un coup très grave à tout le travail, le bon travail qui est fait par nos collègues, que ce soient les collègues de la MONUSCO ou des Agences des Nations Unies. Nous ne pouvons pas le tolérer », a déclaré Jean-Pierre Lacroix ce samedi matin, peu avant de s’envoler pour Bukavu au Sud-Kivu.

Sensibilisation sur l’exploitation et les abus sexuels à Kinshasa le 25 novembre 2016, par l’équipe de Conduite et Discipline de la MONUSCO. Photo MONUSCO/Michael Ali

L’exploitation et les abus sexuels commis par certains agents des Nations Unies non seulement, ternissent en fait l’image de l’Organisation, mais ont parfois mis à mal les relations entre communautés et Nations Unies.

Christian Saunders, coordonnateur spécial pour l'amélioration de la réponse des Nations Unies à l'exploitation et aux abus sexuels, a souligné les « dégâts réputationnels » que peuvent causer l’EAS aussi bien pour les auteurs que pour les Nations Unies : « Vous devez savoir qu'un seul cas avéré d'exploitation et d'abus sexuels est une honte pour vous-même, pour votre famille, pour votre unité, votre contingent, votre pays, et pour la Mission », a-t-il déclaré.

La politique de « tolérance zéro », promue par le Secrétaire général de l’ONU, est au cœur des préoccupations de la MONUSCO.

Ainsi, la Mission a mis en place une série de mesures préventives qui ont permis, sinon d'éliminer, du moins de réduire considérablement les cas d’exploitation et d’abus sexuels :

Instauration du couvre-feu Formation à la prévention de l’EAS pour toutes les catégories de personnel (militaire, policier et civil). Sensibilisation de communautés à la prévention contre l’EAS Formation des points focaux pour la transmission de plaintes à travers les CBCN Identification de zones interdites au personnel onusien (out of bounds-off limits) Distribution au personnel de cartes de poche « tolérance zéro » résumant les normes de conduite contre l’exploitation et l’abus sexuels Interdiction de fréquentation de certains endroits (bars, boites de nuit, etc.). Installation de caméras de surveillance dans des bases militaires pour contrôler les mouvements de personnel Aménagement de périodes de repos et de récupération pour le personnel Organisation d’activités socioculturelles et sportives au profit du personnel

Zéro cas d’abus sexuels rapporté depuis 6 mois

Les résultats suivent. Depuis septembre 2023, aucun nouveau cas d'EAS n'a été signalé à la MONUSCO. C’est une source de satisfaction pour Jean-Pierre Lacroix, qui a toutefois encouragé la Mission à ne pas se reposer sur ses lauriers et à maintenir le cap, avec l’objectif « zéro allégation ».

« Je pense que nous sommes mieux équipés aujourd’hui que par le passé. Il y a eu de nombreuses mesures prises, mais nous avons renforcé la vigilance, en demandant à toutes les composantes [civile, militaire et policière] non seulement de prendre des mesures additionnelles, mais aussi de veiller à ce qu’elles soient mises en œuvre de manière extrêmement stricte », a-t-il déclaré.

Des jeunes de la Compagnie Culturelle ESPOIR disent NON à l'exploitation et abus sexuels à Kavumu, au Sud-Kivu. Photo MONUSCO/Alain Likota

Les communautés locales saluent également les résultats de la politique de la MONUSCO. C’est le cas de Josué Muhindo Kapisa, président du CBCN de Beni qui exprime sa satisfaction devant une nette amélioration de la situation.

Selon lui, cela démontre que la MONUSCO a véritablement pris le problème à bras le corps : « Par rapport à la période d’avant novembre 2023, aujourd'hui la situation est calme et stable. Les mesures mises en place par la MONUSCO sont salutaires. Cela prouve l'attention particulière qu'ils mettent sur la question liée à l’exploitation et aux abus sexuels et nous encourageons à ce que la mesure ne souffre d'aucune faille. Cela pourrait renforcer la confiance entre la communauté et les Nations Unies. »

Jean-Pierre Lacroix a exprimé ses félicitations aux membres (volontaires) des différents réseaux communautaires de rapportage de plaintes pour le sacrifice et leur contribution à l'éradication des abus sexuels. Il leur a rappelé leur rôle et responsabilité dans ce combat :

« Vous êtes les yeux et les oreilles des Nations Unies dans vos communautés, pour nous aider à comprendre ce qu'il s'y passe, et comment unir nos efforts pour mettre fin au phénomène d'abus et d'exploitation sexuels ».

Assistance aux « victimes » des abus sexuels

Outre le volet « prévention », il y a également l’aspect répression dans cette lutte contre l’EAS. Aux Nations Unies, « on ne tolère pas l’exploitation et les abus sexuels ». Chaque plainte est traitée avec sérieux, des enquêtes sont initiées, et les coupables sont sanctionnés.

Récemment dans la région de Beni, un procès a eu lieu devant une cour martiale pour enquêter sur des allégations d’abus sexuels commis par un contingent de la brigade d’intervention de la MONUSCO. Les casques bleus impliqués ont été rapatriés chez eux. Cependant, les victimes ne sont pas abandonnées à leur sort.

La MONUSCO a ainsi établi des structures d’assistance couvrant divers domaines tels que l’assistance médicale aux victimes, le soutien psycho-social, l’appui juridico-légal ainsi que l’exécution des projets de réinsertion socio-économique, à travers le Trust Fund (ou Fonds des Nations Unies aux victimes de l’EAS).

L'unité Conduite et Discipline de la MONUSCO apporte son soutien à un centre d’assistance aux victimes d’exploitation et d’abus sexuels à Sake, à une trentaine de kilomètres de Goma, au Nord-Kivu. Photo MONUSCO/Michael Ali

Dans la région de Beni par exemple, plusieurs mesures ont été prises, parmi lesquelles :

Prise en charge de l’éducation de plus de 75 enfants par an dans toute la zone d’opération Mise en place de formations dans des domaines tels que la pâtisserie, la coupe et la couture, l’esthétique, etc. Plus de 525 femmes, qu’elles soient victimes de l’EAS ou des membres vulnérables des communautés, ont bénéficié de ces formations au cours des trois dernières années. Il s’agit de survivantes de l’EAS, mais aussi de membres vulnérables des communautés.   A la fin de ces formations, toutes les bénéficiaires ont reçu des kits de réinsertion dans la communauté afin de se prendre en charge et soutenir leurs enfants, pour celles qui en ont.

Rappelons qu’en septembre 2023, Christian Saunders, coordonnateur spécial pour l'amélioration de la réponse des Nations Unies à l'exploitation et aux abus sexuels, a effectué une visite dans la région de Beni ; visite qui l’avait conduit successivement à Kilia, Eringeti et Mayi Moya. Il avait également rencontré les membres du personnel des Nations Unies, qu’il avait encouragés à garder à l’esprit qu’ils sont présents en République démocratique du Congo pour servir.