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Uvira: La Monusco appuie une audience foraine en flagrance à la prison centrale Mulunge

Uvira, 05 septembre 2017 - C’est dans le cadre de l’appui conseil de la section d’appui à la justice et l’administration pénitentiaire de la mission de l’organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco), que le tribunal militaire de garnison d’Uvira a tenu ces audiences foraines dans la salle d’audience de la prison centrale Mulunge d’Uvira.

La procédure entre dans le cadre de l’application de la flagrance selon l’ordonnance-loi 78-001 du 24 février 1978, relative à la répression des infractions flagrantes. Ces audiences en flagrance font suite à la découverte de deux grenades (type chinois) dans l’enceinte de la prison district d’Uvira. Une a été trouvée par-dessus de la toiture d’une des salles de bain de la prison et  une autre enfouie dans le sol dans la cour de ladite prison, espace qu’utilisent les pensionnaires pour la cuisson.

En date du 30 août 2017, le Tribunal militaire de garnison de Uvira a introduit et instruit l’affaire sous RP 654/17 grâce à la présentation de sept présumés auteurs (dont six prévenus et un condamné) par l’Auditeur militaire de garnison (AMG) de Uvira pour détention illégale d’armes ou munitions de guerre.

Le Tribunal a désigné d’office deux défenseurs judiciaires aux fins d’assister les prévenus (présumés auteurs). Parmi eux, trois sont des ressortissants burundais (dont deux se présentent comme réfugiés), un militaire FARDC (du 3309e régiment basé à Shabunda et poursuivi pour viol d’enfant) et trois civils.

A l’issue de l’instruction, le président de la chambre a fait application de l’article 249 du code judiciaire militaire, lançant ainsi un mandat d’amener contre la mère  d’un prévenu accusé d’avoir apporté les deux grenades à la prison dissimulées dans un bidon d’huile de 5 litres.

Lors des audiences du 31 août, le jour suivant, au regard de l’instruction, l’AMG/Uvira a décidé d’inculper un renseignant et l’a présenté ainsi devant le Tribunal comme prévenu. Les agents de police judiciaire militaire chargés d’amener la mère du prévenu ont fait constater sa fuite. Le Tribunal a décidé, sur réquisitions de l’AMG, de la poursuivre par défaut ! Au total neuf prévenus ont été poursuivis.    

Durant l’instruction de la cause, six personnes ont été appelées à la barre pour renseigner le Tribunal au sujet de la propriété des grenades, du comment les grenades sont parvenues dans l’enceinte de la prison et pour quelle fin, etc. Parmi les renseignants, la section d’appui à la justice et l’administration pénitentiaire de la Monusco (JCS) a noté le gardien de la prison et le CG et le commandant PM des pensionnaires.

En plus, les coaccusations entre prévenus apparait comme mode d’administration de la preuve. En conséquence, des intérêts opposés sont manifestes. JCS a recommandé et obtenu de l’AMG/Uvira de procéder à la séparation des prévenus dans divers lieux de détention. 

Dans son réquisitoire, l’Auditeur Militaire de Garnison a requis la condamnation à 20 ans de servitude pénale principale (ssp) de tous les prévenus.

Dans sa plaidoirie, la défense et face aux intérêts opposés des prévenus, a sollicité l’acquittement pur et simple de deux prévenus, Jean Bosco et David. Pour les six autres (sauf la prévenue poursuivie sur base de la procédure par défaut), l’admission de circonstances atténuantes dues à l’âge des prévenus (majoritairement entre 25 et 35 ans) et aux conditions dans lesquelles les aveux ont été obtenus par le CG des pensionnaires : la flagellation !  

Vers 17h du 31 août, le Tribunal a prononcé sur dispositif son jugement dont l’économie suit:

Acquitte les prévenus Jean Bosco Haviarimana et David et ordonne leur retourner à leur statut initial; Condamne les prévenus Amani Pierre, Musafiri Maguma, Kiza namuhamba, Océan Manirambona, Thomas Ndiyokubwa Yodani, John harakaza sur base de la procédure contradictoire à 20 ans de ssp pour détention illégale d’armes ou munitions de guerre ; Condamne la prévenue Tabu sur base de la procédure par défaut à 20 ans de ssp pour détention illégale d’armes ou munitions de guerre et ordonne son arrestation immédiate ; Ordonne la confiscation de deux grenades type chinois respectivement de 5 et 10 tonnes au profit de l’Etat congolais.

D’après l’officier associé aux affaires judiciaires de la section Justice and Corrections de la Monusco Uvira, Matsande Bienvenu Pony, l’appui conseil, technique et logistique de la mission onusienne à cette institution étatique vise à désillusionner le statut de prévenu ou de condamné. « En effet, quoique prévenu ou condamné, l’on reste justiciable. Et grâce à la sonorisation, tous les pensionnaires ont suivi le déroulement des audiences », souligne-t-il.

La même source poursuit en précisant que le mode opératoire a été mis à jour. L’objectifs de la tenue des audiences étaot donc aussi de « parvenir à comprendre l’entrée des objets interdits dans l’enceinte de la prison. L’objectif de l’utilisation des grenades est désormais connu. Au regard de l’instruction, les cibles de ces grenades sont les agents de l’ordre commis à la garde et surveillance de la prison. L’intention est l’évasion massive de détenus ».

Au moment de ces audiences, cette prison regorgeait plus de 740 personnes dont 92 militaires et 10 policiers. Alors que sa capacité d’accueil est de 150 personnes, d’après le directeur de la prison, Christian Lukelwa.

La semaine avant ces audiences foraines, la société civile, à travers l’organisation catholique CDJP (commission diocésaine Justice et paix), avait émis le vœux, dans un autre atelier avec les autorités territoriales, de voir ces dernières plaider auprès de la province et des partenaires internationaux pour la délocalisation de cette prison d’Uvira et son désengorgement en tenant compte de l’auto-prise en charge des prisonniers par l’agriculture avec toutes ses filières.

Selon la responsable chargée des projets au sein des mamans commerçantes solidaires pour la paix dans la région des grands lacs (Cosopax/uvira), la sœur Geneviève Nshage, il suffirait d’une attaque des groupes armés pour libérer les leurs dans cette prison, ou d’une tentative d’évasion de l’intérieur de la prison entrainant l’intervention extérieure des forces de sécurité, pour que ce quartier populaire entourant la prison soit touché. Ces acteurs locaux ont proposé l’application de la politique de transfert des bandits des grands chemins dans des régions dont ils ne sont pas originaires.

Photos et Article : Fiston Ngoma