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PDDRC-S : comment le choix de la paternité ramène Patrick, ex-combattant rwandais, dans son pays

Patrick a contacté le Comité national des réfugiés (CNR) basé à Kibabi dans le territoire de Masisi, afin que son cas soit examiné par la section DDR/RR de la MONUSCO. / Photos Tijs Magagi Hoornaert

La MONUSCO, à travers sa section Désarmement, Démobilisation, Réintégration, Rapatriement et Réinstallation (DDR/RR), travaille à la démobilisation d’ex-combattants nationaux et au rapatriement d’ex-combattants étrangers.

Au cours des années qui ont suivi l'installation de la MONUSCO en 1998, la MONUSCO a appuyé le gouvernement dans les opérations de désarmement des groupes armés.

En une vingtaine d'années, la Mission a démobilisé et rapatrié des milliers d’ex-combattants, selon le témoignage de Jean-Claude Bahati Muhindo, de la section DDR/RR de la MONUSCO à Goma : « Depuis 2002, nous avons reçu et rapatrié plus de 10.316 combattants congolais ; 10.235 combattants étrangers, avec 9.496 dépendants. Nous avons également détruit 3.503 armes légères et 48.531 munitions depuis 2004 ».

Patrick, un parcours atypique

Parmi ces milliers d’ex-combattants étrangers se trouve également Patrick (*). Un lundi de l’année 1993, alors la guerre civile éclate dans son pays, il n’est âgé que de quatre ans. Son père est contraint de mettre sa famille en sécurité et de quitter la ville de Giciye au Rwanda pour la province du Nord-Kivu, dans l'est de la RDC.

Aujourd’hui devenu adulte et père, Patrick garde malgré tout des souvenirs de sa famille rwandaise. Sa vie en RDC n’a pas été de tout repos. Il a déménagé plusieurs fois, si bien qu’il n’a pas pu s’adapter. Pendant toutes ces années, il s’est toujours souvenu de son Rwanda natal et a nourri l’espoir de pouvoir y retourner un jour.

Alors qu’il suit le processus de démobilisation, il raconte : « Le premier souvenir que j’ai, c’est lorsque nous étions dans la forêt, fuyant des hommes armés. Mon père nous a conduits en lieu sûr. C'était tout le contraire de la vie sédentaire que nous menions au Rwanda », raconte Patrick, la gorge nouée.

Vingt ans plus tard, la situation n'a pas changé. Au Nord-Kivu où Patrick a passé la majeure partie de sa vie, l'activisme de groupes armés nationaux et étrangers bat son plein.

Il adhère à un groupe armé au sein duquel il reste six années durant. Il décide finalement de le quitter pour retourner à la vie civile. « J'ai déçu mes parents en devenant milicien en 2008. Mon père n'était pas militaire. Mais pour moi, comme pour d’autres jeunes dans ma situation à l'époque, nous n’avions pas d’autres options que de rejoindre des milices armées », atteste-t-il.

Là-bas, dans la forêt, ses espoirs se sont vites éteints. La vie y est dure. Il doit constamment se déplacer, il ne mange pas à satiété, étant constamment à l'affût d'éventuelles embuscades. « J'avais peur, comme beaucoup d'autres combattants », relate Patrick.

Puis vint le jour où il rencontra sa femme, confortant ainsi son désir de fonder une famille et de changer de vie. « La décision de choisir ma femme a été salvatrice. J'ai alors dû quitter la forêt parce que les combattants n'avaient pas le droit d'avoir une famille. Cela a permis à ma femme de tomber enceinte », admet-il, sourire aux lèvres.

C’est ainsi qu’il contacte le Comité national des réfugiés (CNR) basé à Kibabi dans le territoire de Masisi. Son cas est alors examiné par la section DDR/RR de la MONUSCO. En 2014, Patrick et sa famille arrivent au camp de réfugiés de Kibabi, majoritairement habité par des réfugiés rwandais.

« Je voulais donner à ma famille un espace sûr. La vie dans le camp n’était pas facile du tout. J'y suis resté pendant sept ans. Voir mes deux sœurs et mes deux frères quitter le camp avant moi m’a encouragé. Il était évident que mon tour arriverait un jour ».

Patrick et sa famille seront ensuite transférés au centre de Mutobo, au Rwanda, où ils resteront 45 jours, avant de rejoindre Giciye. Là-bas, ils ont appris un métier afin de devenir autonomes dès leur retour au pays après trente ans d’exil.

Patrick : « Je ne veux plus quitter ma famille. J'essaie de leur assurer une vie paisible que je n'ai jamais eue. Je veux devenir conducteur de moto-taxi et parcourir les rues de Giciye comme un vrai parent qui prend soin de ses enfants ».

Patrick a traversé une période difficile de sa vie. Pour autant, il n'a pas rejeté les opportunités qui lui ont été présentées par les autorités congolaises et la MONUSCO. Aujourd’hui, il est devenu un modèle d’inspiration pour d’autres combattants.

(*) Le prénom a été changé.