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Les troupes maliennes et le personnel militaire étranger ont tué plus de 500 personnes lors de l'opération militaire à Moura en mars 2022 - Rapport de l'ONU sur les droits de l'homme

GENÈVE (12 mai 2023) - Un rapport d’une mission d’établissement des faits du Bureau des droits de l'homme des Nations Unies a conclu qu'il y a de fortes indications que plus de 500 personnes aient été tuées – la grande majorité sommairement exécutés – par les troupes maliennes et du personnel militaire étranger au cours d’une opération militaire de cinq jours dans le village de Moura, dans la région de Mopti, au centre du Mali, en mars 2022.

« Ces conclusions sont extrêmement inquiétantes », a déclaré Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme. « Les exécutions sommaires, les viols et la torture pendant les conflits armés constituent des crimes de guerre et pourraient, selon les circonstances, constituer des crimes contre l’humanité ».

Le rapport est le résultat d’une vaste mission d’établissement des faits sur les droits de l’homme menée pendant plusieurs mois par le personnel des Nations Unies au Mali. Les autorités maliennes ont refusé les demandes d’accès au village de Moura. La mission d’établissement des faits est basée sur des entretiens avec des victimes et des témoins, ainsi que sur des sources d’informations médico-légales et autres, telles que l’imagerie satellitaire.

Le rapport détaille jour après jour le déroulement des événements à Moura. L’opération – décrite par les autorités comme une opération militaire antiterroriste contre un groupe affilié à Al-Qaïda connu sous le nom de Katiba Macina – a débuté le 27 mars 2022, jour de marché hebdomadaire très fréquenté à Moura.

Selon des témoins, un hélicoptère militaire a survolé le village en ouvrant le feu sur la population, tandis que quatre autres hélicoptères ont atterri et que des troupes ont débarqué. Les soldats ont encerclé les gens dans le centre du village, tirant au hasard sur ceux qui tentaient de s’échapper. Certains militants de la Katiba Macina présents dans la foule ont riposté aux tirs des troupes. Au moins 20 civils et une douzaine de membres présumés de la Katiba Macina ont été tués.

Puis, au cours des quatre jours suivants, au moins 500 personnes auraient été sommairement exécutées, selon le rapport. L'équipe de la mission d’établissement des faits a obtenu de nombreuses données d'identification personnelle, y compris les noms d'au moins 238 de ces victimes.

Des témoins ont rapporté avoir vu des « hommes blancs armés » parlant une langue inconnue opérer aux côtés des forces maliennes et paraissant parfois superviser les opérations. D'après les témoins, les troupes maliennes entraient et sortaient quotidiennement de Moura, mais le personnel étranger y était resté pendant toute la durée de l'opération.

Le jour suivant l'assaut, les soldats ont commencé à aller de maison en maison à la recherche de « terroristes présumés », apparemment sélectionnant et exécutant sommairement les personnes portant une longue barbe, celles qui portaient un pantalon n’arrivant pas à la cheville, ou ayant des marques sur les épaules interprétées comme le signe qu'elles portaient habituellement des armes, et les personnes qui montraient simplement des signes de peur.

Des témoins ont indiqué à l'équipe de la mission d’établissement des faits qu'un groupe d'hommes rassemblés au sud-est du village avait été emmené par des soldats, puis abattu d'une balle dans la tête, le dos ou la poitrine, et que leurs corps avaient été jetés dans une fosse. Ils ont rapporté que ceux qui ont résisté ou tenté de fuir ont également été exécutés par les forces armées maliennes et les « hommes blancs armés » et jetés dans la fosse.

Au moins 58 femmes et filles ont été violées ou soumises à d'autres formes de violence sexuelle. Dans un cas choquant, des soldats auraient apporté des couchettes d'une maison, les auraient placées sous des arbres dans le jardin, puis auraient violé à tour de rôle les femmes qu'ils avaient forcées à s'y installer.

Des dizaines d'autres personnes ont été arrêtées. Certaines d'entre elles ont été soumises à la torture et à d'autres mauvais traitements lors des interrogatoires et pendant leur détention à Moura, Sévaré, ainsi qu'à l'Agence Nationale de la Sécurité d’État (ANSE) dans la capitale Bamako.

Une victime a décrit comment elle et d'autres détenus ont reçu des coups de poing, des gifles et des coups de pied à la tête, alors que les soldats les traitaient de djihadistes, les accusant de tuer leurs propres frères et de détruire leur pays. Une autre victime a raconté comment des soldats l'ont emmené dans les locaux de la sécurité de l'État où elle a été interrogée, torturée et électrocutée pendant des heures.

Les autorités maliennes ont annoncé l'ouverture d'une enquête peu après l'attaque, mais plus d'un an plus tard et dans l'attente des conclusions finales de l'enquête, elles continuent de nier tout acte répréhensible de la part de leurs forces armées. Le Haut-Commissaire Volker Türk a souligné que les enquêtes sur des rapports aussi graves de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire doivent être menées de manière indépendante, impartiale et transparente, afin que les responsables rendent compte de leurs actes.

“Il est essentiel que les autorités maliennes prennent toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que les forces maliennes engagées dans des opérations militaires et de maintien de l'ordre, y compris le personnel militaire étranger sous leur commandement ou leur contrôle, respectent pleinement les règles du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme", a déclaré Volker Türk.

Le rapport.

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