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Journée internationale de la paix : plus de 300 étudiants de Kinshasa sensibilisés aux discours de haine

A Kinshasa, la journée internationale de la paix, célébrée le 21 septembre 2022, a été marquée par une conférence-débat organisée par le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’Homme (BCNUDH), conjointement avec le Bureau de l’Information publique de la MONUSCO (SC-PID), à l’intention de plus de 300 étudiants sur la lutte contre les discours et messages incitant à la haine. 

Au cours de la rencontre tenue à l’hôtel Pullman, dans un contexte où la RDC connaît une montée vertigineuse des discours de haine distillés via les réseaux sociaux, Aziz Abdoul Thioye, directeur du BCNUDH, a rappelé à l’audience venue des universités de Kinshasa les six questions à toujours se poser pour interrompre la chaîne de distribution des discours de haine et de désinformation sur les plates-formes numériques.

Ces questions sont consacrées dans le plan d’action de Rabat portant sur l'interdiction de l'appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence.

Ce plan du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme a été mis en place pour ne pas mettre à mal la liberté d’expression, tout en luttant contre les discours de haine et la désinformation.

Faire appel au bon sens

Dans son exposé, M. Thioye a appelé ces jeunes étudiants à « faire appel à votre bon sens et créer une attitude de distanciation », face aux contenus distillant la haine.

« Avant de cliquer et partager un contenu, pensez aux conséquences et posez-vous les bonnes questions, sur le statut de l’auteur de ce contenu, l’objet du message, l’intention avec laquelle le contenu ou message a été créé, la forme du discours, l’ampleur que prendra ce message ou ce contenu ainsi que la probabilité de causer un préjudice », a-t-il expliqué.

Le directeur du BCNUDH a par ailleurs souligné que les réseaux sociaux ont un effet miroir qui amplifie, multiplie et pousse à agir sans penser aux conséquences. « Je nous exhorte tous à dénoncer les discours de haine et à sensibiliser votre entourage de façon individuelle. Nous devons tous nous approprier cette lutte. Ne jamais partager sans avoir vérifié », a-t-il conclu.

Le sommet de l’Etat congolais impliqué contre les discours de haine

Christophe Boulierac, directeur de la division de l’Information publique, a rappelé que la lutte contre les discours de haine est prise en compte au sommet de l’Etat congolais. Il a insisté sur le fait que, dans son discours du 20 septembre devant l’Assemblée générale de l’ONU, le chef de l’Etat congolais, Félix Tshisekedi, a rappelé la nécessité de bannir les discours de haine.

« L’Etat congolais et la société civile congolaise ne permettront jamais à quiconque de tenir un discours de haine tribal, ethnique ou xénophobe dans notre pays. La constitution de la république et les lois congolaises interdisent un tel discours et le sanctionne sévèrement », a rappelé Christophe Boulierac, citant les propos du chef de l’Etat.

Le directeur du SC-PID a insisté sur le fait que « face aux discours de haine, nous avons tous le devoir de briser la chaîne de distribution. La paix est difficile à construire, mais facile à détruire ».

Les manipulés face à la justice plus que les manipulateurs

Le professeur Esambo Kangeshe, doyen de la faculté des droits à l’université de Kinshasa, l’un des orateurs, a rappelé que la constitution congolaise consacre la liberté de manifester et d’expression ; manifester étant un droit fondamental.

« Mais quand la violence s’en mêle, les manifestations perdent toute leur légitimité. Ceci devient une infraction qui relève du droit pénal congolais », a-t-il martelé.

Le professeur Esambo a interpellé les étudiants sur les manipulateurs. « J’attire votre attention sur cette question : les manipulateurs échappent souvent à la justice parce qu’ils agissent dans l’ombre. Mais ce sont les manipulés qui tombent dans les pièges et subissent la rigueur de la loi : ne vous laissez pas manipuler. Résistez », a-t-il affirmé.

L’effet miroir des réseaux sociaux

Participant aussi à cette journée de réflexion, le professeur Ndukuma Adjayi Kodjo a fourni des données chiffrées quant aux utilisateurs d’internet en RDC : 40 millions de Congolais sont sur les réseaux sociaux, selon lui. 

Il a rappelé que, selon une étude, en RDC et dans le monde, ce sont des contenus comportant des discours de haine et obscènes qui battent le record des partages. « Avec 40 millions de personnes connectées en RDC et plus de 3 milliards dans le monde, imaginez-vous la vitesse avec laquelle une fausse information peut circuler et faire des dégâts dans le monde », a-t-il dit.

Le professeur Kodjo a rappelé qu’il existe des dispositions légales en RDC qui criminalisent les discours de haine. Il a fait référence à l’article 199 bis du code pénal reprenant la loi de 1975. « Cette loi punit la désinformation qu’elle qualifie de ‘faux bruit’ », apprend-t-il.

Il a également fait référence à la loi numéro 20/017, article 195, qui punit de servitude pénale de 5 à 10 ans les personnes commettant des infractions par le biais des vois électroniques, commettant une infraction envers une personne en raison de son appartenance à un groupe caractérisé par la race, l’origine nationale ou ethnique.