Le Gouvernement centrafricain, avec le soutien de la MINUSCA, a organisé une conférence de haut niveau sur la transhumance. Cette conférence, qui visait à identifier des pistes de solution durable à la problématique de la transhumance, a réuni de nombreux acteurs locaux des préfectures traversées par les couloirs de transhumance ainsi que la MINUSCA, l’équipe de pays des Nations Unies, les partenaires techniques et financiers, et des organisations non-gouvernementales. Lamido Issa Bi Amadou, président du Conseil national des chefs traditionnels peulhs de Centrafrique, a participé à cet événement et a gentiment accepté de répondre à nos questions.
Question : Aujourd'hui, il y a eu cette importante conférence et comme on le sait, la plupart des éleveurs sont des peulhs. En tant que membre de cette communauté, pensez-vous que la transhumance retrouvera sa place légitime après ces discussions ?
Lamido Issa Bi Amadou: Comme vous avez pu le constater lors des débats, le Gouvernement s'efforce de pacifier et d'apaiser la transhumance. Cependant, sur le terrain, la situation est difficile en raison de l'utilisation des couloirs de transhumance par les groupes armés. Il est donc essentiel de sécuriser ces couloirs pour que la transhumance puisse se dérouler dans un environnement sûr. Nous demandons donc au Gouvernement d'intensifier la pression militaire pour libérer ces espaces et permettre aux éleveurs de vaquer librement à leurs occupations.
Question : En tant que responsable des peulhs, quelles sont vos actions prioritaires à envisager dans l'immédiat ?
Réponse : En ce moment critique, notre priorité est de solliciter le soutien du Gouvernement pour intensifier la pression militaire sur le terrain. Cela permettrait aux groupes armés de libérer les espaces pastoraux, offrant ainsi aux éleveurs la liberté de pratiquer leur activité de transhumance en toute sécurité. Nous appelons également à l'installation de bases militaires et de relais dans les zones d'élevage afin de sécuriser et de pacifier ces régions.
Question : Outre la menace des groupes armés, il existe souvent des conflits entre éleveurs et agriculteurs. Que proposez-vous pour favoriser une coexistence pacifique entre ces deux communautés ?
Réponse : Les éleveurs et les agriculteurs sont destinés à vivre ensemble car ils sont complémentaires et partagent les mêmes ressources. Nous devons donc mettre en place des stratégies de communication pour favoriser la réconciliation entre ces communautés. Nous intensifierons nos efforts de sensibilisation sur le terrain pour promouvoir le vivre-ensemble et la réconciliation.
Question : En ce qui concerne le prix de la viande, qui est souvent élevé à Bangui par rapport aux autres préfectures, quelles solutions envisagez-vous du côté des éleveurs ?
Réponse : Le prix élevé de la viande à Bangui est en partie dû au circuit de commercialisation long et aux intermédiaires impliqués. Il est donc essentiel de réduire l'impact de ces intermédiaires afin de raccourcir les circuits de commercialisation et de rendre la viande plus abordable pour les ménages.
Question : Donc, vous suggérez d'éliminer les intermédiaires ?
Réponse : Il est nécessaire de réduire l'impact des intermédiaires pour abaisser les prix de la viande et rendre les circuits de commercialisation plus efficaces.
Pour rappel, la République centrafricaine (RCA) est un territoire de transhumance par excellence avec 16 millions d'hectares de pâturages et un réseau hydrographique dense. L'élevage bovin représente 12,7 % du PIB national et 35% du PIB.
La gestion de la transhumance est une composante essentielle des dispositions de l'Accord Politique pour la Paix et la Réconciliation en RCA et de la Feuille de Route de Luanda. A cet égard, le soutien de la MINUSCA se manifeste en autres par la mise en œuvre de son mandat de protection des civils dans les zones de transhumance, en collaboration et en soutien aux Forces de Défense et de Sécurité centrafricaines, ainsi que par un appui technique et financier aux Comités de mise en œuvre préfectoraux.